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Créé le 07.03.2019

«Notre objectif: devenir la première banque de détail numérique de Suisse»

Conformément aux attentes, PostFinance a enregistré un résultat en baisse pour l’exercice 2018. Dans cet entretien, Hansruedi Köng, président de la direction, explique comment il souhaite s’y prendre pour préparer PostFinance à affronter l’avenir. La transformation de l’entreprise en Digital Powerhouse constitue un élément essentiel de cette préparation.

Les opérations basées sur une plateforme recèlent à nos yeux un potentiel considérable.
Hansruedi Köng, Président de la direction PostFinance

Hansruedi Köng, qu’en est-il du résultat de l’exercice écoulé?

En 2018, nous avons enregistré un résultat d’entreprise de 187 millions de francs, ce qui représente un recul de 276 millions de francs, soit environ 60%, par rapport à l’exercice précédent. 

Qu’est-ce qui explique cette baisse marquée du bénéfice?

Tout d’abord, le résultat des opérations d’intérêts est inférieur de 164 millions à celui de 2017. Ensuite, durant la période précédente, un bénéfice unique de 109 millions de francs avait pu être comptabilisé suite à la vente de deux portefeuilles d’actions.

Ce que vous annonciez depuis des années est donc arrivé?

Oui, hélas, le recul du résultat est conforme à nos attentes, et il s’explique par deux facteurs: la faiblesse persistante des taux d’intérêt sur les marchés financiers et l’interdiction qui nous est faite d’octroyer des crédits et des hypothèques, nous contraignant à placer les fonds des clients sur les marchés financiers avec des rendements très faibles. S’il est vrai que cette interdiction nous a toujours fortement pénalisés par rapport à la concurrence, elle nous porte encore plus gravement préjudice depuis l’avènement des taux d’intérêt négatifs.

Les résultats 2018 font-ils aussi apparaître des évolutions positives?

Dans les opérations de commission, notre résultat a progressé de 17 millions de francs, ce que nous devons surtout à une augmentation des recettes au niveau des fonds de placement. Nous avons aussi été en mesure de réduire les coûts de personnel de 20 millions de francs. En outre, les mesures prises en vue d’exploiter de nouvelles sources de revenus, indépendantes des taux, d’une part, et de gagner en efficacité, d’autre part, sont en train de porter leurs fruits.

Vont-elles permettre d’inverser la tendance?

Non, l’évolution négative va se poursuivre. Dans les deux prochaines années, les placements en obligations opérés précédemment et encore bien rémunérés vont arriver à échéance: cela représente près de 20 milliards de francs que nous ne pourrons réinvestir qu’avec des rendements très faibles.

Qu’est-ce que cela signifie en chiffres concrets?

Compte tenu du bas niveau des taux d’intérêt, nous pourrons peut-être encore effectuer ces placements à un demi pour cent, ce qui se traduira de nouveau par une perte de bien plus de 200 millions de francs sur le résultat des opérations d’intérêts d’ici à 2020. Notre marge d’intérêts va en pâtir lourdement, et les gains d’efficience ne permettront pas à eux seuls de compenser ce recul dans les opérations d’intérêts.

Le Conseil fédéral envisage depuis peu de vous prêter main-forte en levant l’interdiction d’octroyer des crédits

J’ai pris note avec une grande satisfaction de la décision de principe du Conseil fédéral. Nous avons développé plusieurs scénarios pour lui montrer les options dont dispose PostFinance. Si l’interdiction d’octroyer des crédits est maintenue, notre bénéfice va continuer de régresser, ce qui va entraîner une détérioration de la valeur de l’entreprise mais aussi mettre en péril des centaines d’emplois et, à terme, fragiliser un pilier porteur pour le financement du service universel assuré par la Poste.

N’avez-vous pas tendance à noircir le tableau?

Non, malheureusement, je vous dépeins ici la réalité. Sachant que la décision finale ne sera pas prise par le Conseil fédéral, mais par le Conseil national et le Conseil des États, j’en appelle au sens des responsabilités des membres du Parlement vis-à-vis d’une entreprise comme PostFinance, une banque d’importance systémique qui appartient à l’ensemble des citoyens de ce pays. L’interdiction d’octroyer des crédits détruit peu à peu ce bien public et doit donc être rapidement abolie.

L’interdiction d’octroyer des crédits détruit un bien public et doit donc être rapidement abolie.
Hansruedi Köng, Président de la direction PostFinance

Des voix critiques s’élèvent pour dire que le marché des hypothèques fonctionne bien en Suisse et qu’il n’est pas nécessaire d’y faire entrer un nouvel acteur – public, qui plus est

C’est là un point de vue qui peut tout à fait s’exprimer. Néanmoins, quand on défend une organisation libérale du marché, on ne peut pas s’opposer à l’arrivée d’un nouveau concurrent.

Selon vous, quelle est la probabilité que l’interdiction d’octroyer des crédits soit un jour levée?

Il reste encore à accomplir un abondant travail de persuasion, mais je veux croire que ce sera la force des arguments qui prévaudra aussi, au final, au sein du Parlement.

D’ici quelle date attendez-vous une décision?

L’Administration fédérale est en train d’élaborer un avant-projet. Sur cette base, le Conseil fédéral pourra transmettre le projet de loi défini et le message correspondant au Parlement. Si ce dernier approuve la modification de la législation, l’entrée en vigueur pourrait avoir lieu en 2021. Néanmoins, si un référendum devait avoir lieu, le processus durerait une bonne année de plus.

Qu’allez-vous faire d’ici là pour maintenir PostFinance sur les rails?

Notre objectif est clair et précis: faire de PostFinance la première banque de détail numérique de Suisse. Pour être prêts, techniquement, à endosser ce rôle, nous avons renouvelé notre système de noyau bancaire à Pâques 2018, dans le cadre d’un projet titanesque que nous avons pu mener à bien grâce à la formidable mobilisation de notre personnel et de nos partenaires. En relevant ce défi, nous avons aussi montré que notre entreprise était capable de maîtriser des démarches extrêmement complexes en respectant les délais, ce qui est important au regard des exigences que nous imposent les évolutions toujours plus rapides du monde d’aujourd’hui.

La stratégie étant définie et le fondement établi, quelles seront les prochaines étapes pour PostFinance?

Sur le plan opérationnel, nous avons déjà pris de nombreuses mesures pour bien préparer l’entreprise à affronter l’avenir. En ce qui concerne nos recettes, nous nous attachons à moins dépendre des opérations d’intérêts en misant sur de nouveaux domaines d’activité, tels que les placements numériques et les opérations basées sur des plateformes. Enfin, au niveau des dépenses, nous exploitons rigoureusement tous les potentiels d’économie, par exemple en réduisant nos coûts grâce à l’automatisation et à la dématérialisation des processus.

Que signifient ces mesures d’économie pour le personnel?

Mi-2018, nous avons annoncé la suppression de jusqu’à 500 emplois à plein temps d’ici la fin 2020. Ces suppressions se feront essentiellement sur la base des fluctuations naturelles, mais nous ne pourrons pas éviter des licenciements. Bien que nous le déplorions, nous y sommes contraints pour assurer la compétitivité et la réussite de PostFinance à long terme, comme en témoigne la forte baisse du résultat enregistrée en 2018. En parallèle, nous continuons de promouvoir l’innovation et nous créons des emplois dans de nouveaux domaines d’activité.

Vous avez évoqué les opérations basées sur des plateformes. Font-elles partie des activités que vous souhaitez développer?

Oui, car elles recèlent à nos yeux un potentiel considérable. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé Valuu fin janvier 2019. Il s’agit là de la première plateforme entièrement numérique pour la distribution, la comparaison et la souscription d’hypothèques. Nous sommes convaincus qu’elle répond à un véritable besoin et qu’elle intéressera les preneurs d’hypothèque potentiels.

En quoi s’agit-il d’une innovation?

Il existe déjà des plateformes permettant de comparer les prêts hypothécaires, c’est vrai, mais elles relèvent toutes du modèle de la filiale ou de l’agence physique – ou alors il est uniquement possible d’y comparer les taux. Valuu est la seule à offrir aux intéressés un processus numérique de bout en bout, de la consultation initiale des offres à la souscription finale de l’hypothèque.

Qu’est-ce qui fait que PostFinance est précisément qualifiée pour exploiter une telle plateforme de comparaison d’hypothèques?

Selon notre étude de marché préalable, les preneurs d’hypothèque associent le financement à une banque. Nous avons misé là-dessus. Les autres banques de Suisse ont moins d’intérêt à exploiter ce type de plateforme, car elles pourraient ainsi cannibaliser leur propre activité hypothécaire. Pour sa part, du fait de l’interdiction d’octroyer des crédits, PostFinance n’exerce pas d’activités hypothécaires en tant que telles, mais possède néanmoins le savoir-faire nécessaire. Elle est donc la seule banque de Suisse à pouvoir proposer une telle plateforme sans risquer le conflit d’intérêts.

Pourquoi PostFinance investit-elle dans des nouvelles technologies de cette nature?

Avec la mutation numérique, il y a tout lieu de penser que des modèles commerciaux d’un nouveau genre s’imposeront, demain, sur le marché. Le secteur de la musique illustre parfaitement mon propos: avant, on achetait des CD; maintenant, on a le streaming. Une évolution comparable se dessine dans le secteur bancaire. Plutôt que d’adopter une attitude attentiste, nous voulons être partie prenante à l’essor du numérique et amorcer nous-mêmes des évolutions, voire d’éventuelles disruptions, dans le domaine bancaire.

Et quelles sont les nouveautés numériques qui vont apporter un plus à votre clientèle?

Toutes nos nouveautés visent à rendre la gestion de l’argent aussi simple que possible pour notre clientèle. Nous voulons lui faciliter la tâche pour tout ce qui a trait aux questions financières. À l’automne dernier, nous avons intégré une plateforme en libre-service à la PostFinance App. Elle permet notamment à nos clients d’assurer une gestion intégrale de leur PostFinance Card par voie numérique. Cette année, nous allons aussi introduire dans e-finance une nouvelle procédure de login fonctionnant par reconnaissance faciale ou sur la base d’une empreinte digitale.

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