Pression exercée par les coûts: optimiser les processus et ancrer les changements au sein du personnel

06.03.2025

Lorsque la situation économique est difficile, les entreprises se voient souvent confrontées à un défi de taille: réduire les coûts et optimiser les processus sans perdre leur personnel de vue. Mais comment gagner en efficacité tout en continuant d’assumer ses responsabilités envers son personnel? La gestion des changements est une des réponses possibles à cette question. Valérie Greisler, experte en gestion des changements au sein d’APP Conseil en organisation SA, nous explique comment utiliser cet outil.

En bref

  • Pression exercée par les coûts et optimisation des processus: beaucoup d’entreprises doivent améliorer l’efficacité de leurs processus pour réduire les coûts, tâche délicate s’il en est.
  • Le facteur humain: lors de tout changement, le facteur humain joue un rôle central. Pour être pleinement efficace, un nouveau processus doit être bien accepté et appliqué par les membres du personnel.
  • La gestion des changements, un précieux atout: l’experte Valérie Greisler décrit comment les entreprises peuvent gérer leurs processus de changement pour que les membres du personnel adoptent la nouvelle solution.

De nombreuses entreprises subissent une pression constante de la part des coûts et cherchent des moyens pour travailler plus efficacement. Optimiser les processus pour économiser du temps et des ressources est un excellent levier à cette fin. Dans ce cadre, si les solutions technologiques et l’automatisation jouent souvent un rôle déterminant, le succès du changement dépend aussi énormément du facteur humain. Les collaboratrices et les collaborateurs doivent comprendre les nouveaux processus, les accepter et y participer activement – faute de quoi, les mesures d’optimisation sont condamnées à échouer. C’est là qu’intervient la gestion des changements: à l’aide de mesures adéquates, cette méthode qui met l’accent sur les personnes veille à ce que les changements soient non seulement mis en œuvre, mais aussi ancrés à long terme.

Grâce aux conseils de Valérie Greisler, experte en gestion des changements, les entreprises et les administrations informent, impliquent et qualifient leurs membres du personnel de sorte qu’ils soient plus susceptibles d’accepter les changements. Dans cet entretien, elle détaille les points importants à considérer.

Consultante senior chez APP Conseil en organisation SA, Valérie Greisler est spécialisée dans la gestion des changements.

Quels sont les principaux défis posés par les optimisations des processus?

Les entreprises doivent avoir conscience que les optimisations des processus exigent des investissements, et donc du temps et des ressources. Le processus actuel est souvent mal connu et nécessite donc d’être clarifié au préalable pour tout le monde. D’ailleurs, cette étape est aussi indispensable pour pouvoir évaluer le potentiel d’économies. Par la suite, l’ébauche du nouveau processus, ainsi que son introduction et son ancrage demandent également des investissements non négligeables surtout pour les processus complexes.

L’élaboration du nouveau processus en elle-même constitue un autre défi. Dans ce cadre, il convient de se focaliser sur l’optimisation, et non sur la transition numérique. Si cette dernière peut s’avérer utile, il faut commencer par réaliser une évaluation critique des différentes étapes du processus et éliminer les inefficacités. Dématérialiser les étapes de travail superflues d’un processus inefficace n’améliorera pas ce dernier.

Toutefois, il ne suffit pas d’analyser et de remanier les processus pour bien les optimiser. Il est aussi capital d’impliquer dans la transition les personnes qui travaillent quotidiennement avec ces processus. Elles doivent donc accepter et appliquer les changements. Mais comment parvenir à cet objectif? Le facteur humain est primordial pour réussir à adapter des processus.

Dans quelle mesure?

Optimiser des processus entraîne des changements que des personnes devront finalement mettre en œuvre. Or, la plupart d’entre nous sont bien placés pour le savoir: nous aimons ce que nous connaissons, ce qui nous permet de travailler efficacement et en autonomie parce que nous savons exactement ce que nous devons faire. En revanche, nous avons tendance à nous méfier des changements. En effet, tout changement apporte son lot d’incertitudes et nous oblige à apprendre quelque chose de nouveau. Nous voyons donc souvent les changements comme des épreuves. Et lorsqu’une optimisation des processus est introduite pour des raisons de coûts, les collaboratrices et les collaborateurs se demandent naturellement si l’entreprise souhaite réduire les coûts d’exploitation, de papier ou bien les charges de personnel. Ils craignent pour leur emploi et ont peur de ne plus recevoir de tâches. Cela peut rapidement générer de l’incertitude, voire de la résistance.

Mais comment procéder pour que les collaboratrices et les collaborateurs adoptent les nouveaux processus?

Le mot-clé? La gestion des changements. Pour mieux saisir ce concept, on peut se représenter un pont reliant deux montagnes, l’une symbolisant la situation actuelle, l’autre la situation visée. Les collaboratrices et les collaborateurs empruntent ce pont pour passer de la situation actuelle à la situation visée. En d’autres termes, le but de la gestion des changements est d’accompagner les changements grâce à des mesures ciblées et de soutenir ainsi le personnel pendant la transition. Mais attention: si la gestion des changements peut faciliter les choses pour les membres du personnel lors d’un changement, ce n’est pas une panacée. Dans le cadre de nos prestations de conseil, nous utilisons notre propre modèle de gestion des changements, qui repose sur trois piliers: la communication, l’interaction et l’accompagnement.

Quel est l’objet du premier pilier?

Il faut communiquer le contexte et l’objectif de l’optimisation des processus aux membres du personnel et leur expliquer ce que signifie le changement pour eux. Mais il ne faut pas se contenter d’annoncer la transition une première fois et de n’en reparler que lors du lancement, surtout pour les projets importants qui s’étalent sur une longue période. Il vaut mieux informer le personnel en continu et petit à petit afin d’aborder progressivement le changement. Cela permet de le rendre plus «digeste» et de l’introduire plus en douceur.

Sur quels axes prioritaires travaillez-vous pour l’interaction?

L’interaction porte sur l’échange entre les parties concernées. La participation constitue une forme d’interaction. Personne ne connaît mieux les processus que les collaboratrices et les collaborateurs qui les appliquent: ils savent donc souvent ce qui fonctionne mal. Les membres du personnel feront davantage confiance à la nouvelle solution et accepteront mieux les changements s’ils participent activement à l’optimisation. Combien de personnes impliquer, et lesquelles? La réponse varie au cas par cas: pour les optimisations de processus qui ne touchent que quelques personnes, il est possible d’impliquer toutes celles qui travaillent avec le processus en question. Pour les changements complexes concernant plusieurs services ou plusieurs équipes, il peut être judicieux de travailler avec des représentations. Tester le nouveau processus est aussi un bon moyen pour impliquer activement les membres du personnel, surtout en cas de dématérialisation. En outre, ces derniers peuvent jouer le rôle d’ambassadrices et d’ambassadeurs internes pour le changement.

Quelles sont les mesures du troisième pilier, c’est-à-dire l’accompagnement?

Je me concentre sur tout ce qui aide les collaboratrices et les collaborateurs à travailler avec le nouveau processus et à se sentir compétents. Il peut notamment s’agir de formations introductives proposées au bon moment et dans le bon format: communiquer une information et des instructions simples suffit-il? Vaut-il mieux opter pour des vidéos didactiques ou bien pour des formations classiques sur place ou à distance? Quel format donner aux unités de formation? Faut-il proposer de brefs modules ou bien des formations d’une demi-journée? Les besoins des personnes qui appliquent les processus doivent toujours être au cœur de toutes ces réflexions.

Il est aussi important de garder à l’esprit que la théorie et la pratique sont deux choses différentes. Connaître le fonctionnement théorique d’une chose ne signifie pas forcément que l’on est capable d’appliquer ces connaissances. Autrement dit, si tout nous semble logique au moment de la formation avant l’introduction d’un nouveau processus, il n’en sera pas forcément de même lorsqu’il faudra appliquer la théorie au moment du changement effectif. C’est souvent à cet instant précis que l’on se pose les questions importantes et que les vraies difficultés apparaissent. Des documents, des instructions ou des exercices supplémentaires peuvent aider à faciliter le passage à la pratique. Proposer des séances de consultation après les formations est aussi un moyen efficace. Les membres du personnel peuvent en profiter pour poser les questions qui leur viennent après coup, dès que le travail sur le processus s’accélère.

Tels sont, dans les grandes lignes, les leviers que nous actionnons dans le cadre de nos prestations de conseil, pour impliquer les collaboratrices et les collaborateurs, les préparer le mieux possible au changement et les y faire adhérer.

Les entreprises ont parfois du mal à communiquer lorsqu’elles doivent adapter des processus en raison de la pression exercée par les coûts. Quelle est votre recommandation en la matière?

Il faut toujours réfléchir aux informations que l’on peut communiquer immédiatement et à celles que l’on doit ou que l’on veut garder secrètes pour le moment – surtout quand l’objectif final de l’opération est d’économiser des coûts au niveau du personnel. Mon conseil: faites preuve d’honnêteté et de transparence dans une mesure acceptable. Vous ne parviendrez pas à duper longtemps vos collaboratrices et vos collaborateurs si vous invoquez des prétextes au lieu de présenter la vraie raison du changement. Communiquez en continu, même si tous les détails ne sont pas encore clairs. Avec des déclarations telles que «Nous ne le savons pas encore» ou «Nous ne pouvons pas encore évaluer pleinement les conséquences», vous garderez un ton humain et serez en meilleure posture que si vous ne dites rien ou si vous répandez des informations non vérifiées. Vous éviterez ainsi de propager des rumeurs.

On trouve un large éventail d’outils d’optimisation des processus: la gestion agile des processus, Kaizen, Six Sigma, ou encore le modèle en cascade. Quelle est la pertinence de la gestion des changements dans ces méthodes?

La gestion des changements joue un rôle important dans toutes les méthodes mentionnées, car elle concerne l’aspect humain d’une optimisation des processus. Une amélioration continue des processus ou, au contraire, un projet de grande envergure dans ce domaine avec une introduction «tonitruante» nécessitera seulement d’adapter la planification et de choisir les méthodes de gestion des changements pertinentes. En définitive, toutes ces méthodes visent à aider les membres du personnel à passer de la situation actuelle à la nouvelle situation.

Les optimisations des processus liées à la transition numérique, à l’automatisation et à l’utilisation de l’IA préoccupent-elles les membres du personnel? Comment les entreprises peuvent-elles réagir à cela?

Les membres du personnel qui ont tendance à être surmenés au travail peuvent accueillir favorablement une optimisation de processus visant à gagner du temps et à automatiser des tâches. Pour les personnes concernées, c’est l’occasion de pouvoir davantage se concentrer sur leur cœur de métier. En revanche, une optimisation qui supprime des éléments essentiels du travail humain est naturellement perçue comme une menace. Il est alors important de chercher à en parler avec les membres du personnel en question, de leur expliquer la situation et de discuter des possibilités qu’elle offre. C’est une façon de montrer aux collaboratrices et aux collaborateurs que leurs inquiétudes sont prises au sérieux et qu’ils sont soutenus pendant le changement. Attention: ne jamais enjoliver les faits.

La gestion des changements aide-t-elle à concevoir des processus de changement plus humains?

La réponse est claire: oui! La gestion des changements met l’accent sur les personnes concernées par le changement. Elle aide les collaboratrices et les collaborateurs à mieux comprendre les changements, à les accepter et à les gérer. Pour autant, ce n’est pas une panacée, parce qu’elle ne porte pas sur le contenu du changement. Si le but de l’optimisation des processus est d’économiser du personnel, alors telle est la situation visée. Cette méthode permet simplement de rendre la transition aussi humaine que possible.

  • L’analyse et l’optimisation des processus désignent une méthode systématique visant à améliorer les processus de travail existants. Il est essentiel d’analyser les processus pour pouvoir les optimiser. Cette étape sert de base pour prendre des mesures d’amélioration fondées et ciblées. Sans une analyse détaillée, on court le risque de ne modifier que superficiellement les processus inefficaces ou de changer les mauvaises choses. En outre, l’analyse des processus fournit une base de données pour prendre des décisions fondées. Les optimisations des processus permettent d’améliorer l’efficacité des processus d’affaires et de réduire les coûts.

  • De nombreuses raisons internes et externes peuvent justifier d’analyser et d’optimiser les processus, notamment:

    • les économies de coûts: en éliminant le gaspillage, en réduisant les erreurs et en utilisant plus efficacement leurs ressources, les entreprises peuvent réaliser des économies considérables;
    • l’augmentation de la productivité: les processus optimisés permettent de réduire les étapes de travail superflues, de gagner du temps et d’améliorer la collaboration;
    • les avantages concurrentiels: les entreprises disposant de processus efficaces peuvent réagir aux besoins du marché plus rapidement et à moindre coût;
    • la satisfaction du personnel: les processus clairs et bien pensés facilitent le travail, réduisent la frustration et favorisent la motivation;
    • les exigences externes: la clientèle, les partenaires commerciaux ou les dispositions réglementaires exigent l’adaptation de processus.
  • Voici quelques signes indiquant des faiblesses dans les processus:

    • longs délais d’exécution et retards: les processus durent plus longtemps que nécessaire, ce qui entraîne des retards de livraison, des dépassements de délai et une mauvaise utilisation des ressources;
    • coûts élevés et gaspillage de ressources: une consommation superflue de matériel, des stocks importants ou une mauvaise utilisation du personnel et des machines font grimper les coûts d’exploitation;
    • processus flous on non structurés: un manque de standardisation et des responsabilités floues entraînent des erreurs, des redondances et une collaboration inefficace;
    • surmenage et inefficacité des membres du personnel: les membres du personnel sont surmenés et perdent en productivité en raison d’une bureaucratie superflue, d’étapes de travail manuelles ou d’un manque d’automatisation;
    • dématérialisation insuffisante et systèmes obsolètes: des logiciels obsolètes, des systèmes non reliés ou des processus sur papier empêchent de travailler efficacement et de manière flexible;
    • difficultés en matière de scalabilité: les processus existants ne peuvent pas suivre le rythme de la croissance commerciale, ce qui entraîne des surcharges et des baisses de performance.

Trois conseils pour bien optimiser les processus

Conseil 1: pas d’optimisation de processus sans gestion des changements – pensez au facteur humain

En plus de toutes les méthodes et de toutes les technologies pertinentes, le facteur humain est décisif pour optimiser les processus. La gestion des changements assure la planification, mais aussi la mise en œuvre efficace et l’acceptation des nouveaux processus. Les résistances et les incertitudes sont repérées et traitées en amont afin de pouvoir améliorer durablement les choses. Lors de l’adaptation aux nouvelles méthodes de travail, la gestion des changements peut influencer positivement la transition et garantir le succès de l’optimisation à long terme en misant sur une communication et un soutien ciblés avec des formations.

Conseil 2: est-ce que ça marche? Mesurez le succès de vos mesures d’optimisation

Nous vous recommandons de définir et d’utiliser des indicateurs clés de performance ainsi que des systèmes de surveillance adaptés pour mesurer le succès des mesures d’optimisation. Autrement dit, vous devez régulièrement contrôler l’efficacité des mesures que vous avez prises, demander du feed-back et, si nécessaire, effectuer d’autres adaptations pour optimiser continuellement les processus d’affaires.

Conseil 3: l’optimisation des processus comme un projet durable – ne perdez pas vos processus de vue

L’optimisation des processus n’est pas un projet unique, mais un processus d’amélioration continue. Les entreprises devraient analyser régulièrement leurs processus, identifier les inefficacités et adapter ce qui mérite de l’être. À cette fin, les décisions basées sur les données, les technologies modernes et une culture d’entreprise considérant le changement comme une chance sont autant d’outils précieux. C’est la seule façon pour les entreprises de rester compétitives et efficaces à long terme.

Vous souhaitez approfondir votre connaissance du monde des affaires?

Cette page a une évaluation moyenne de %r sur un maximum de 5 étoiles. Au total, %t évaluations sont disponibles.
Vous pouvez évaluer la page en attribuant 1 à 5 étoiles, les 5 étoiles constituant la meilleure note.
Merci pour l’évaluation
Évaluer l’article

Ceci pourrait également vous intéresser